Emmanuel Descroix a eu « plusieurs vies » : de la grande distribution en passant par l’industrie, puis les neurosciences. Il va nous parler des motivations ayant entraîné ces évolutions de carrière.
Emmanuel, en quelques mots « d’où venez-vous » et « où allez-vous » ?
En quelques mots ? Il y a une trentaine d’année, jeune titulaire d’un bac B (ES), j’intègre directement la grande distribution et découvre de plein pied le monde du travail comme employé libre-service. Comme je suis curieux, plein d’énergie et volontaire pour progresser, je deviens rapidement chef de rayon, chef de secteur puis sous-directeur d’un hypermarché. A 25 ans je crée ma première société dans l’industrie du cycle, qui finalement se positionne comme l’un des trois leaders reconnus sur ce marché en France.
En 2010 à 43 ans, je deviens étudiant et intègre les bancs de la faculté en première année de psychologie à Grenoble, et dans le même temps je vends ma société. En 2011 je crée Maego formation parallèlement à la poursuite de mes études vers un master recherche en psychologie cognitive et sociale (DEA). Aujourd’hui je suis enseignant chercheur au LPNC laboratoire de psychologie et neuro-cognition à Grenoble, un laboratoire CNRS à l’université Grenoble Alpes. Je suis toujours gérant de Maego Formation et formateur en communication interpersonnelle dans cette société.
Comment les neurosciences sont-elles entrées dans votre vie professionnelle ?
J’ai toujours exercé des fonctions qui m’imposaient de devoir communiquer. Il fallait motiver mes équipes, convaincre un banquier, vendre mes produits, fédérer mon personnel, discerner un vendeur, sonder un futur collaborateur... Il y a une quinzaine d’années j’embauchai un cadre qui s’avérait plus tard être quérulent processif (terme employé par le système judiciaire lié à une pathologie procédurière). En moins d’un an, avant que nos chemins se séparent, il avait réussi à saper le moral et l’ambiance au sein de mon « head office ». Je m’inscrivais en première année de psychologie afin de mieux comprendre les interactions (proactives ou réactives) qui se nouent au cours de ces moments si particuliers, positifs ou négatifs dans l’histoire d’une société. J’en concluais que pour mieux percevoir les réactions, les motivations, les émotions et même la cognition il était nécessaire d’aborder la communication interpersonnelle comme un point central et déterminant. C’est à ce moment, puis pendant la poursuite de mes études que j’ai contracté « le virus des neurosciences ». Je vis aujourd’hui au travers de mes activités de recherche au sein de l’université ma passion pour la compréhension et le décryptage des comportements. Au sein de Maego formation, j’ai l’opportunité de transmettre ce savoir basé sur les données et modèles scientifiques que je rends compréhensible pour tous.
Par le biais de MAEGO Formation, vous animez des formations en « BODYSYSTEMICS ». Kezako ?
MAEGO est spécialisée dans la formation à la communication interpersonnelle. C’est un sujet vaste, mais pour faire simple nous proposons des formations à la communication persuasive, par exemple comment négocier et vendre ou comment manager par la communication efficace. De plus, concernant l’aspect perceptif et analytique de la communication, nous avons mis en place avec nos collègues Suisse une méthode : la Bodysystémics. Elle permet de décrypter le langage non verbal et comprendre les intentions d’un interlocuteur. A ce propos je vous invite à lire le résumé que j’ai écris sur le langage non verbal en cliquant sur l’onglet « La méthode & le langage non verbal » sur le site dédié à la Bodysystémics. L’anglicisme Bodysystemics reprend les termes « Body », le corps, et « systemic », le système. Cette formation permet de comprendre et d’analyser les comportements non verbaux produit par le corps, en les reliant au contexte, à l’environnement dans lesquels ils sont produits. Le tout forme un « système » dans lequel l’individu réagit mais ne peut s’extraire. Les logiques environnementales (au sens large), anatomiques, psychiques, physico-chimiques, sociales, sociétales... permettent de comprendre les dynamiques émotionnelles et intentionnelles de l’individu qui communique.
La « communication non verbale » s’apparente parfois à de l’ésotérisme ! Comment mesurer l’efficience de la BODYSYSTEMICS ?
Oui malheureusement vous avez raison ! Avec les séries « Lie to me » ou « Le mentaliste » le « non verbal » est à la mode, notamment dans la fonction RH.
Depuis une vingtaine d’années, la diffusion en masse de nouvelles technologies tel que l’IRMF, la TEP, la MEG… et l’apport des neurosciences cognitives a permis de clarifier les modèles sous-jacents à la communication non verbale, c’est un domaine infini et en pleine évolution qui produit de nombreuses publications scientifiques, et j’ai la chance d’y avoir accès directement au sein de mon laboratoire à l’université.
Votre question pose également celle de la crédibilité du formateur, d’où vient-il, quel est son expérience, sa formation, est-il reconnu, possède t-il des diplômes, à t-il une méthode…? Il existe aujourd’hui pléthore de formations qui proposent des modules de décryptage du langage non verbal. Au final, il y a un gap important entre ce qui est enseigné par les « soi disant spécialistes du non verbal » et ce qui est réellement vécu ensuite par les apprenants. Des incohérences, des illogismes, voire des contradictions apparaissent et plongent l’étudiant dans la confusion quand il revient des sessions de formations, d’où cette impression d’ésotérisme ou de confusion.
Je dirais que la réponse est dans la question ! Faire un listing d’items non verbaux en leur donnant un sens n’est pas suffisant pour aborder correctement le non verbal et donner un sens à ce qu’on voit ! La bodysystémics n’est pas une discipline mais une méthode qui permet de mesurer des comportements. C’est bien la question de l’outil de mesure dont il est question ! Bien entendu cet outil ne peut s’écarter des données et critères scientifiques et doit proposer une véritable méthode d’analyse basée sur ces mêmes fondements. Cette méthode doit impérativement être simple pour être efficace et utilisable au quotidien de manière rigoureuse, car la communication, verbale ou non, est mesurable et possède ses propres logiques.
Qui peut suivre ce type de formation et quelles en sont les applications au quotidien ?
Tout le monde communique, la « Body » est donc utilisable par tous, j’ai moi même enseigné cette méthode à mes enfants au cours de formation dispensées en weekend. Désormais ils sont mieux armés pour aborder leur vie d’adulte, mieux comprendre les intentions, les émotions et les réactions de leurs interlocuteurs, et ils se connaissent mieux !
Plus spécifiquement quand vous avez les moyens de décrypter l’intentionnalité ou l’émotion réellement vécue de votre interlocuteur, vous êtes non seulement conscient mais aussi plus libre de décider quelle sera la nature de votre relation avec autrui. Vous faites le choix conscient d’orienter votre relation dans le sens que vous souhaitez et vous l’assumez. C’est un avantage certain non seulement pour vous même mais aussi pour votre interlocuteur. Dans cette optique, l’objet n’est donc pas de détecter le mensonge ou les non-dits comme le proposent certaines formations en jouant sur vos peurs, mais aussi et surtout de mieux communiquer. Bien entendu je forme des enquêteurs policiers et gendarmes dont l’une des fonctions est de connaître la vérité. Cependant, les applications pour les fonctions de management, de vente et de négociation sont évidentes. Il en va de même pour ceux qui exercent des fonctions de soignant ou de coach.
Maitriser et comprendre la communication interpersonnelle au sein d’une dyade ou en groupe c’est enrichir sa vie à tout point de vue, c’est aussi se rendre soi même plus libre au sein de notre société ! N’oublions pas que ce qui caractérise l’homme en tant qu’animal social c’est qu’il est capable de communiquer et d’échanger volontairement des informations.
Emmanuel DESCROIX :
Nous remercions Emmanuel DESCROIX de nous avoir fait partager sa passion : la communication entre les « Hommes ».
Fondée en 2005, la société ELHO Ressources Humaines est spécialisée dans le conseil en recrutement industriel.
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